Au mois d’avril, j’ai rencontré un groupe de peuls qui venait de terminer un stage d’alphabétisation en fulfulde. Ce groupe était composé d’une bonne vingtaine d’hommes et d’une seule femme !
J’ai demandé pourquoi il n’y avait qu’une seule femme. Il m’a été répondu qu’ils avaient choisi de faire ce stage dans un endroit central pour permettre aux peuls de différents villages (parfois éloignés de 16 km) d’y participer. Résultat, seuls les hommes qui ont une moto ou un vélo (et moins de travail pour les besoins quotidiens de la famille) ont pu suivre les cours. Les femmes sont restées chez elles.
J’ai répondu que s’il voulait que je continue à les appuyer (notamment en prenant en charge le « salaire » de l’enseignant, il fallait trouver une solution qui permettent aux femmes et aux jeunes filles qui le désirent de profiter, elles aussi, de l’enseignement.
Il m’a été répondu que pour cela, il fallait ouvrir trois centres au lieu d’un seul. J’ai dit que j’étais prêt à soutenir trois centres si les femmes étaient intéressées. J’ai rappelé les conditions et j’ai terminé en disant que je viendrai les voir quand ils seront prêts.
C’est ainsi que le mercredi 30 décembre 2009, je me suis rendu dans les quartiers peuls de Lolo, Zounou et Pala. Chaque communauté peule avait construit le hangar qui devait abriter les stages. J’ai pu me rendre compte que les femmes étaient très désireuses d’apprendre. Dans chaque centre, elles étaient, de loin, les plus nombreuses. Et la joie de pouvoir se former se lisait sur leurs visages.
C’est ainsi que le 4 janvier 2010, nous allons ouvrir ces trois centres, avec la participation de plus de 50 femmes et jeunes filles peules (déjà inscrites). Les hommes aussi, étaient là. L’un deux m’a dit sa joie de pouvoir, depuis le stage d’alphabétisation qui s’est terminé en avril dernier, envoyer des SMS en fulfulde avec son téléphone portable(voir la photo ci-contre). Et il a fait une démonstration devant nous !
Ce jour, ma conviction s’est renforcée : l’intégration des peuls passent par l’alphabétisation des hommes et des femmes peuls en fulfulde. Mais le pays devrait redoubler d’effort pour accompagner ce désir des peuls de se former. Désir qui n’existait peut-être pas il y a quelques années, mais qui depuis peu semble être, chaque année, de plus en plus fort. Il est urgent de prendre en compte cette nouvelle opportunité. Il n’est pas possible de laisser les éleveurs peuls à l’écart. D’autant plus que la prévention des conflits entre éleveurs et agriculteurs passent aussi par le développement de l’alphabétisation.
Koudougou, le 6 janvier 2010
Maurice Oudet
Président du SEDELAN