Pas de prix plancher pour le maïs !

Depuis un mois, tout le monde le sait : les récoltes seront bonnes cette année au Burkina Faso. Mais aujourd'hui, c'est officiel. Dans la presse ce matin, en parcourant le compte-rendu des travaux du Conseil des ministres du mercredi 5 novembre, nous pouvons lire : « Les prévisions donnent une production céréalières nationales abondantes et nettement supérieures à celle de la campagne écoulée. »

« La production céréalière prévisionnelle nationale 2008-2009 est estimée à 4 213 256 tonnes soit une progression de 36% par rapport à la campagne précédente. Il en découle un excédent prévisionnel national de 717 000 tonnes ».

Aujourd'hui, la production céréalière prévionnelle du Burkina se présente suivant le tableau ci-dessous :

Campagne agricole
Mil
Sorgho
Maïs
Riz
Fonio
Total
2008/2009
1 196 629 1 950 064 803 521 235 810 24 833 4 213 256
2007/2008
966 016 1 507 162 533 874 68 916 12 643 3 088 811
Variation : 08-09/07-08
24 % 29 % 51 % 242 % 93 % 36 %
Moyenne des 5 dernières années
1 091 844 1 464 063 669 314 88 342 9 535 3 323 148
Variation : 08-09/Moyenne
10 % 33 % 20 % 167 % 159 % 27 %

Ce tableau est tiré du quotidien burkinabè Sidwaya du vendredi 7 novembre 2008 qui rend compte de la conférence de presse du Ministre de l'Agriculture M. Laurent Sédogo. Le Ministre se réjouit de ces bons résultat, notamment de la production record de riz qui a fait un bond de 242 %. Avec ce commentaire (du Ministre ou de l'auteur ?) : « Cela s'explique sans doute par l'effort fourni par le gouvernement pour donner un coup de pouce à cette filière et atténuer ainsi le phénomène de la vie chère. »

Pas un mot sur l'effort des producteurs. Pas un mot sur la réactivité des paysans au marché. L'explication principale, c'est évidemment que les producteurs de riz savent que les commerçants ne trouvent plus de riz de mauvaise qualité (à prix cassé) sur le marché mondial, et donc qu'ils sont prêts à acheter leur production au prix fort ! Actuellement les commerçants achètent souvent à 200 F CFA (30 centimes d'euro) le kilo de riz paddy. Rien à voir, donc, avec les malheureux 85 F que ces mêmes commerçants proposaient il n'y a pas si longtemps.

Au cours de cette conférence, le Ministre Laurent Sédogo a dit : « Nous allons travailler à ce que les producteurs ainsi que les consommateurs tirent profit de cette bonne campagne agricole ». Pourtant, le gouvernement semble avoir déjà prit partie en faveur des consommateurs. Nous avons vu dans un numéro récent d' abc Burkina que le gouvernement propose un prix plancher à 115 F pour le kilo de riz paddy, au moment où les paysans vendent leur riz à 200 F !

Plus grave, tout le monde sait que ce sont les cours du maïs, du sorgho et du mil qui ont besoin d'être soutenu si l'on ne veut pas qu'une fois de plus les paysans soient dépossédés du fruit de leur travail. Déjà, sur la route Ouagadougou – Bobo-Dioulasso les sacs de maïs s'accumulent. Ils sont proposés à 6 000 F le sac, soient à 7 500 F les 100 kilos.

Tout le monde sait que dans quelques jours, les commerçants pourront acheter des sacs semblables dans des villages à peine reculés à 4 000 F le sac (soit 5 000 F les 100 kilos). Ces mêmes sacs qui, il y a un mois, étaient vendus à 18 000 F les cent kilos. Tout le monde sait (le gouvernement ne peut pas l'ignorer) qu'un bon nombre de paysans ont déjà vendu sur pieds une partie importante de leur récolte à vil prix !

Face à cela, que propose le gouvernement : des mots ! « Nous allons travailler à ce que les producteurs (ainsi que les consommateurs) tirent profit de cette bonne campagne agricole. » Mais dans un document émanant de sont ministère, un document intitulé « Plan d’urgence pour la réalisation de la sécurité alimentaire et nutritionnelle », on peut lire :

« Les prix aux producteurs des autres céréales (maïs, sorgho, mil) devraient faire l'objet d'une attention de telle sorte que l'abondance des produits n'entraîne pas une chute importante des revenus des producteurs. Les OPA (Organisations de Producteurs Agricoles) pourraient jouer un rôle important.»

Que propose donc le gouvernement pour soutenir les cours du maïs, du mil et du sorgho (et donc la très grande majorité des paysans burkinabè) :

 

Pas de prix plancher, pas de mesures de soutien des prix.

Simplement « Que nos paysans se débrouillent ! »

Koudougou, le 8 novembre 2008
Maurice Oudet
Président du SEDELAN
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