La bonne politique !

Nous sommes à un moment critique où des négociations commerciales d'une ampleur jamais égalée sont en cours à l'O.M.C. A travers ces négociations, c'est, entre autres, l'avenir d'un milliard d'agriculteurs qui est en jeu, dont 800 millions de paysans pauvres des pays du Sud.

Or ces paysans sont absents des structures de négociations de l'O.M.C. Celles-ci sont réservées aux responsables politiques des Etats représentés à l'O.M.C. Il est permis d'être inquiets quand on sait que "la bonne politique a le secret de faire mourir de faim ceux qui, en cultivant la terre, font vivre les autres."  Voltaire, philosophe français (1694 - 1778).

"La bonne politique" a été définie par le Directeur Général de l'O.M.C. M. Supachai Panitchpakdi, quand il affirme dans son discours d'orientation au World Food and Farming Congress, à Londres, le 25 novembre 2002 :

"la libéralisation du commerce dans l'agriculture est probablement la contribution la plus importante que le système commercial multilatéral peut apporter pour aider les pays en développement, y compris les plus pauvres d'entre eux, à sortir de la pauvreté".

( http://www.wto.org/french/news_f/spsp_f/spsp06_f.htm (uniquement en anglais))

Pourtant une autre politique est possible : celle qui défend le droit des peuples à se nourrir eux-mêmes; celle qui garantit le droit des peuples à produire leurs aliments de base. Une autre politique est possible : celle que réclament le mouvement paysan mondial "Via Campesina" comme le ROPPA (Réseau des Organisations Paysannes des Producteurs Agricoles de l'Afrique de l'Ouest), qui affirmaient à Ouagadougou, le 17 juin 2001 : " Les agriculteurs de Via Campesina et du ROPPA réaffirment le droit pour les pays (ou groupes de pays) du Sud et du Nord de protéger leur agriculture et leur marché afin de rémunérer équitablement le travail et les produits des exploitations familiales agricoles ". Ce que réclame ces paysans, c'est donc la protection à l'importation. Ce que pratiquent les pays du Nord, mais ce qu'ils veulent interdire aux pays du Sud. Exactement le contraire du discours du Directeur Général de l'O.M.C.

C'est aussi ce que réclamaient plus récemment les agriculteurs venus du monde entier (de 40 pays, de quatre continents) réunis à Cotonou dans leur résolutuion finale : " La production alimentaire de base de chaque pays doit être protégée et tenue à l’écart des négociations ambitieuses de l’Organisation Mondiale du Commerce. Il est nécessaire de faire adopter une nouvelle réglementation dans ce domaine."

Entre ces deux thèses, entre ces deux politiques, il va falloir choisir. Laisserons-nous les seuls politiques décider de notre avenir dans les bureaux et salles climatisées de Genève. 
Il est temps d'organiser un débat public. 
Il est temps de convoquer la société civile.

Aussi, je lance un appel à tous les médias, du nord comme du sud, aux plus grands comme aux plus petits (bulletin, journaux, hebdomadaires, radios, télévisions…) : Que tous organisent un vaste débat sur cette question essentielle pour l'avenir de notre planète. 

Quelle politique adopter ? 

Celle que veulent mettre en place les Etats-Unis et l'Union Européenne, c'est à dire celle que défend le Directeur Général de l'O.M.C. ? 

Ou bien celle du mouvement paysan mondial "Via Campesina", et de millions de producteurs des pays du Sud ?

Maurice Oudet

Ouagadougou, le 9 janvier 2003.

FaLang translation system by Faboba