Lettre ouverte aux évêques Européens et aux évêques des différentes conférences épiscopales des pays A.C.P. (Afrique, Caraïbe, Pacifique) : Les évêques des Etats-Unis et de l'Amérique centrale |
Le quotidien La Croix du mercredi 28 septembre a publié, sous la signature du père Jésuite Jean-Yves Calvez un article très éclairant. Il présente une brassée de déclarations d'Eglise au sujet du traité de libre-échange que les Etats-Unis ont signé avec l'Amérique centrale le 28 mai 2004. Ces déclarations (en provenance des évêques des Etats-Unis, du Guatemala, du Nicaragua, du Sédac (Secrétariat Episcopal d'Amérique centrale), des Jésuites d'Amérique centrale, et bien d'autres, mettent en garde contré les dangers de ce traité de libre-échange. "On y lit que la situation économique et sociale de l'Amérique latine est mauvaise... indépendamment du traité. Le traité survient là-dessus, pas comme un remède, mais un facteur d'aggravation. On a l'impression que les communautés paysannes les plus pauvres vont pâtir d'une ouverture des marchés, nullement libérale : ouverture aux produits agricoles américains subventionnés, qui vont "inonder" les marchés, comme ils l'ont fait déjà au Mexique... "Ceci pourrait entraîner violence et troubles sociaux en Amérique centrale." Ici, des évêques des Etats-Unis ont signé. Et encore : "L'Amérique centrale voit s'abaisser des barrières douanières, les barrières sanitaires et phytosanitaires demeurent, elles, et bien sûr l'Amérique centrale est, de son côté, dans une situation d'infériorité technologique pour appliquer des barrières de ce genre." Puis : "Il y a aux traité de libre-échange un présupposé doctrinaire non déclaré, à savoir que l'Etat doit intervenir en se mettant au service non du bien commun mais des entreprises multinationales et de leurs investissements!" Au moment où l'Europe se prépare à signer des accords de libre-échange avec différentes zones de pays ACP (et notamment avec l'Afrique de l'Ouest), nous devrions les prendre en considération. En lisant ces textes, je me disais qu'on pourrait remplacer Etats-Unis par Europe, et Amérique centrale par pays ACP (ou Afrique de l'Ouest) pour qu'ils décrivent très exactement notre situation, à une différence près : La relation entre l'Europe et les pays A.C.P. sera encore plus déséquilibrée. Les pays ACP (comme l'Afrique de l'Ouest) sont loin d'avoir atteint le niveau de développement de l'Amérique centrale. De plus, l'Europe est encore plus orientée vers l'exportation. Son industrie agroalimentaire très performante transformera les africains en consommateurs de produits européens (ce qui est déjà fait dans une certaine mesure, mais la tendance se renforcera) et les paysans africains n'auront qu'une alternative : s'enfoncer dans la misère ou émigrer. Mais l'Europe est en train de prendre le chemin d'Israël. Elle construit des murs et des barricades, à l'instar de l'Espagne qui relève ses barrière de protection autour des enclaves de Ceuta et de Melilla. "Où va l'humanité ? C'est la question des évêques des USA et d'Amérique latine. En Afrique, à ma connaissance, les évêques ne se sont pas encore prononcés sur les Accords de Partenariat Economique (APE, qui sont de fait des accords de libre-échange) que l'Europe prépare à marche forcée avec les pays africains. Il nous reste encore deux ans pour empêcher la signature de ces accords. Faudra-t-il attendre que l'irréparable soit accompli pour que des voix autorisées se lèvent (en Europe ou en Afrique) du côté de l'Eglise. Koudougou le 1° octobre 2005 |