La couleur blanche serait-elle une « erreur alimentaire » ? Il est étonnant de s’apercevoir qu’à Ouagadougou les familles qui consomment du tô le préparent uniquement (ou presque) avec du maïs blanc. Pourtant, il n’y a pas si longtemps, ce plat « national » était préparé à base de mil ou de sorgho. Mais aujourd’hui, pour obtenir une belle couleur blanche, il est préparé à partir de maïs blanc. Il est donc moins nourrissant. Et voilà que les Ouagalais semblent faire la même « erreur » avec le riz. Le riz blanc, bien poli est préféré au riz étuvé, alors que tous les spécialistes de l’alimentation vous diront que le riz étuvé est bien meilleur pour la santé.
Oui, délaisser le riz étuvé au profit de riz blanc, bien poli, bien joli… c’est se désintéresser de sa santé, et surtout de celle de ses enfants. En effet, le riz blanc, dépossédé du son, n’a que très peu de valeur nutritive.
Pour vous en convaincre, je vous propose ce petit document de M. Didier Pol :
« Christiaan Eijkman (1858-1930) fut de 1888 à 1896 le médecin du pénitencier de Java alors sous tutelle hollandaise. De nombreux prisonniers étaient atteints de béribéri, une maladie du système nerveux conduisant à la paralysie et à la mort. Eijkman nourrissait les poules du pénitencier avec du riz poli, aliment de base des prisonniers. Beaucoup de poules étaient atteintes d'une polynévrite ressemblant au béribéri. Lorsque le commandant du pénitencier interdit à Eijkman d'utiliser le riz des cuisines pour nourrir ses poules, il acheta du riz complet et eut la surprise de constater que les poules guérissaient de leur paralysie. Comme le riz complet ne diffère du riz poli que par la présence des enveloppes du grain, le son, Eijkman eut l'idée de nourrir certaines poules avec un mélange de riz poli et de son. Les poules guérirent comme avec le riz complet. Il affirma que la polynévrite des poules est analogue au béribéri et en déduisit, à tort, qu'il existe une toxine dans le riz et un antidote dans le son. En appliquant le même traitement aux prisonniers il fit néanmoins disparaître le béribéri. » (extrait de « La découverte des vitamines »).
Or le riz étuvé est un compromis entre le riz complet (donc avec le son, riche en vitamine, mais d’aspect marron, invendable bien que le meilleur pour la santé) et le riz blanc : au moment de la pré-cuisson, quand le riz est passé à la vapeur d’eau, des éléments du son se retrouve dans la graine. C’est ce qui lui donne sa valeur nutritive. Les spécialistes estiment que l’étuvage multiplie par deux le taux de vitamine B1, et par trois celui des vitamines B2 et PP.
Et ce n’est pas tout. A partir de 100 kg de riz paddy, vous obtenez (selon des documents du gouvernement burkinabè) 60 à 62 kg de riz blanc décortiqué (ce riz qui n’a aucune valeur nutritionnelle) ou 70 à 75 kg (selon de nombreux constats personnels sur les plaines de Bama et du Sourou) de riz étuvé (celui qui est bon pour la santé, qui possède des vitamines en abondance).
Comment peut-on continuer à préférer le riz blanc, joli, bien poli… au riz étuvé ? Je n’ai pas vraiment de réponse, si ce n’est celle-ci : la force d’une habitude alimentaire… désastreuse. Nos enfants, nos familles méritent d’être aussi bien traités que les poules de la prison de Java !
Si maintenant on s’intéresse à la situation nationale, on peut se demander aussi pourquoi les responsables du pays ne s’intéressent pas plus au riz étuvé. Je n’ai pas de réponse. Ce qui est sûr c’est que négliger le riz étuvé entraîne une perte après récolte considérable.
Aujourd’hui, le gouvernement prévoit que la prochaine récolte sera de l’ordre de 300 000 tonnes de riz paddy. Cela nous donne avec un rendement de 61 % : 183 000 tonnes de riz blanc, bien joli, bien poli...
Si au contraire, on s’oriente pour transformer toute la récolte en riz étuvé (en prenant un rendement moyen de 72,5 %), on obtient 217 500 tonnes de riz étuvé. Soit un bénéfice de 34 500 tonnes de riz consommable ! Ce qui n’est pas rien ! Soit un « bénéfice » de près de 19 % !
Bonne Nouvelle pour les Ouagalais qui sont prêts à changer leurs habitudes alimentaires au profit de leurs familles ! Les étuveuses du Sourou viennent d’ouvrir un magasin à Ouaga. Un magasin facile d’accès. Il se trouve au quartier Pissy en face de la station Shell située au feu tricolore avant l’ONEA (quand vous venez du centre ville). Le magasin se trouve donc à droite. En voiture, au feu vous tournez à droite, vous faites 10 m sur le goudron, puis vous quittez le goudron en tournant encore à droite ; vous longez alors la dizaine de magasins qui sont maintenant sur votre gauche. Vous verrez alors l’enseigne
« Riz étuvé du Sourou –anyogontè ».
Pas de problème de stationnement ! Il y a de la place pour vous accueillir. Le sac de riz de 25 kg vous sera vendu 8 500 F. Le sachet d’un kilo : 400 F. (Contact : 70 44 38 57).
Bon appétit !
Koudougou, le 1er octobre 2009
Maurice Oudet
Président du SEDELAN