Les propositions d’un producteur de la Vallée du Kou

Le prix du riz importé a connu cette année une hausse vertigineuse, mettant ainsi cette denrée hors de portée des populations. Même le riz local n’a pas été épargné par cette hausse. Comment rendre le prix du riz accessible à tout le monde ? A cette question, Abdoulaye Ouédraogo, un producteur de riz et président des coopératives rizicoles Faso Djigui de la Vallée du Kou à Bama propose dans cet entretien des pistes de solution.

 
Abdoulaye Ouédraogo

 Sidwaya (S.) : Quel est aujourd’hui le prix du riz que vous vendez à Bama ?

 Abdoulaye Ouédraogo (A.O.) : Le prix du riz a considérablement augmenté à Bama. Je suis dans la production du riz il y a plus de 30 ans, mais je n’ai jamais connu une telle flambée du prix du riz. On est aujourd’hui à 177 F CFA le kg du riz paddy. Ce prix sur le marché était de 110 F CFA, et le sac à 15 500 F CFA au lieu de 12 000 F CFA. La boîte du riz décortiqué (soit 2kg) est aujourd’hui à 700 F CFA alors qu’elle était à 400 F CFA.

 S. : Le Burkina Faso importe beaucoup de riz. Est-ce que le riz que vous produisez peut suffire à nourrir le Burkina ?

 A.O. : Je ne peux pas affirmer que la production locale de riz peut satisfaire la demande nationale. C’est un peu difficile. Depuis longtemps, le riz produit au Burkina occupe le 1/3 de la demande nationale. En son temps, nous avons proposé au gouvernement de protéger et de valoriser nos producteurs pour qu’ils puissent produire beaucoup plus afin de diminuer les importations. Cela n’a pas été fait. Et voilà que le problème resurgit aujourd’hui. Si des efforts avaient été faits pour motiver les producteurs, les importations, à défaut d’être supprimées allaient en tout cas baisser.

S. Qu’est-ce que vous voulez que l’Etat fasse concrètement pour vous ?

A.O. : Nous demandons à l’Etat de faire en sorte que les producteurs de riz puissent vivre de leur travail. Il faut que celui qui récolte son riz puisse l’écouler correctement avec des prix intéressants qui lui permettent de faire des bénéfices et des revenus. Si le producteur a des revenus, il a le courage de faire des efforts. Mais si c’est le contraire qui se produit, celui-ci aura des difficultés à payer ses dettes. Dès cet instant, il va se décourager et abandonner la culture du riz.

S. : Mais est-ce que l’Etat peut compter sur vous pour satisfaire la demande nationale en riz et atténuer les importations afin de baisser son prix ?

A.O. : Le Burkina Faso peut compter sur nous. Nous avions fait des propositions mais on ne nous a pas écoutés. Le Burkina Faso a importé en 2006 pour 37 milliards de FCFA de riz. Au lieu de continuer à importer du riz, il faut appuyer les producteurs. Nous savons que nos Etats ne sont pas solides pour nous subventionner. Mais le gouvernement peut nous aider avec des facteurs de production à des coûts acceptables et aussi nous aider à écouler nos produits. Nous avons sept grandes plaines au Burkina Faso, de nombreuses petites plaines et bas-fonds propices à la production du riz. Le fait que la production du riz n’est pas valorisée, certains la prennent comme une activité subsidiaire. Si on donne au riz ce qu’on octroie à la production du coton comme aide, je crois qu’on ramènerait l’importation du riz de 37 à environ 10 milliards de F CFA. Dans ce contexte de vie chère généralisée, le pays qui arrive à s’occuper correctement de ses producteurs peut s’en sortir. Un pays ne peut pas se développer en comptant sur les importations. Il faut s’autosuffire avant de pouvoir se développer. Le producteur doit vivre de son travail. Je demande aux autorités de soutenir nos producteurs de riz.

S. : On reproche souvent au riz local la qualité. On dit généralement qu’il ne “ gonfle ” pas. Qu’en dites-vous ?

A.O. : Le riz local est de très bonne qualité. Le riz qu’on importe est du vieux riz qui a plus de cinq ans d’âge. Il ne contient plus d’humidité et de matières nutritives. C’est pour cela qu’il gonfle. Or le riz local contient toujours des matières premières et de l’humidité. C’est pour ça qu’il ne gonfle pas, sinon c’est du bon riz que nous produisons.

Adaman DRABO

Sidwaya le jeudi 22 mai 2008

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