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Le SIAO pourra-t-il résister aux APE ?

La 10^ème édition du SIAO (Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou) s’est ouverte le vendredi 27 octobre 2007. Trente (30) pays, 2 500 artisans, 200 acheteurs professionnels et plus de 400 000 visiteurs sont attendus à ce rendez-vous culturel et commercial. Pour la plupart des visiteurs de la capitale, c’est l’aspect festif qui domine. Pour les exposants et les acheteurs professionnels, c’est l’aspect commercial.

Les artisans présents au salon peuvent être classés en différentes catégories. Une première catégorie se tourne résolument vers la clientèle locale : c’est le cas de ceux qui proposent des produits alimentaires. On trouve ici bon nombre de groupements de femmes qui transforment les produits locaux. C’est ainsi que nous trouvons de la farine pour l’alimentation des petits enfants (farine Misola), des savons ou des huiles fabriqués à partir des fruits du karité ou du neem, des biscuits de soja... Cette année, on trouve aussi le riz de Bagré ou du Sourou (les deux plus grandes plaines rizicoles du pays). Le plus intéressant du côté du riz, c’est que l’on trouve enfin du riz étuvé présenté soit dans de jolis sachets, soit en sacs de 25 kg. Ce riz étuvé, de bonne qualité, n’a rien à envier au riz du Cathwel ! Des produits qui peuvent aller ainsi dans le circuit moderne de distribution. De plus, M. Tomojema, présent à chaque salon, offre aujourd’hui des étuveuses « démontables » qui peuvent traiter 50 kg de riz en une fois, à un prix abordable pour les groupements de femme qui vivent de ce travail. Ces étuveuses sont en vente à 75 000 F.

D’autres artisans (certains sont plutôt des artistes que des artisans) sont tournés vers la clientèle internationale. Dans cette catégorie on trouve les sculpteurs (sur bois, ou encore « les bronziers » ), ceux qui travaillent le cuir, et les stylistes (modes vestimentaires). Ces derniers s’adressent également à cette partie de la clientèle locale qui a un pouvoir d’achat certain !

Certains ne sont pas des artisans. Comme Filsah et Fasotex qui transforment le coton burkinabè. Nous sommes là au stade industriel.

La littérature africaine est également présente au SIAO.

Cette année, le Salon a pour thème : « Artisanat Africain et Commerce Equitable ». Aussi sont présents à ce salon des artisans qui se situent dans cette filière, ainsi que quelques ONG qui font la promotion du « commerce équitable ».

D’autres enfin, comme la CPF (Confédération Paysanne du Faso), s’efforcent de faire du lobbying, pour que l’ensemble du commerce (spécialement le commerce international) soit moins injuste. C’est pourquoi la CPF est bien présente à ce 10^ème SIAO. A son stand, on trouve un certain nombre de produits fabriqués par ses membres. Mais surtout la CPF recueille des signatures pour soutenir sa pétition, tournée vers les chefs d’Etats de la CEDEAO et ceux de l’Union Européenne. Cette pétition demande aux chefs d’Etat de réorienter les négociations vers des Accords de Partenariat Economique qui respectent la Politique Agricole de l’Afrique de l’Ouest et sa Souveraineté Alimentaire.

En regardant ces visiteurs qui signaient la pétition, je me suis demandé : Le SIAO lui-même pourra-t-il résister aux APE ? Quels seront les exposants en 2020 ? Si les Accords sont signés tels que l’Union Européenne le souhaite, on peut penser que les artisans et les artistes qui sont déjà orientés vers l’exportation survivront. Par contre, tous ceux qui essaient de créer de nouveaux produits alimentaires, voire une petite industrie de transformation, seront balayés.

La fête aura-t-elle lieu ? Seuls viendront les 200 acheteurs professionnels et ceux qui accepteront de venir rêver devant de jolis articles comme ces chemises qui restent inaccessibles à la plupart des visiteurs d’aujourd’hui.

Venez donc faire un tour au 10^ème SIAO (personne ne peut vous dire aujourd’hui combien de SIAO suivront !), et profitez-en pour signer la pétition de la CPF !

Si vous voulez voir quelques photos commentées du 10^ème SIAO, merci de vous rendre à l’adresse ci-dessous :

http://www.abcburkina.net/vu_vu_fr5/imag_44/photos_siao_10_1.htm

Koudougou, le 30 octobre 2006
Maurice Oudet
Président du SEDELAN