Effets pervers des subventions américaines et européennes à l’agriculture sur les producteurs africains :
"Nos gouvernements doivent prendre leurs responsabilités"
Les subventions agricoles en Amérique et en Europe
S’il y a un facteur dominant qui justifie la chute des cours mondiaux des produits agricoles et notamment le coton, c’est assurément les subventions dont bénéficient de la part de leurs gouvernements respectifs les producteurs américains et européens. Les subventions agricoles y sont si alléchantes que les risques de surproduction sont permanents. Les chiffres sont éloquents en la matière. En 2000/2001, le gouvernement américain a déboursé près de 2 940 milliards de francs CFA au profit des 31 500 producteurs de coton, ce qui représente 6 à 7 fois le budget national du Burkina Faso, soit près de 91 millions de francs CFA pour chacune des 31 500 unités de production. La production de coton aux USA a donc augmenté de 700 000 tonnes entre 2000/2001 et 2001/2002.Par conséquent, les prix sur le marché mondial ont chuté considérablement et le prix payé aux producteurs africains est présentement en-dessous de 0,6 euros/kg de fibre soit 393 francs CFA. Au-delà des effets pervers de ces subventions sur les productions des pays du Sud comme le Burkina Faso, au-delà des campagnes menées pour obtenir leur suppression pour une question d’équilibre planétaire, il y a tout de même lieu de se poser un certain nombre de questions plus approfondies.
Surtout que, curieusement, dans ces pays où l’on subventionne, seulement près de 5% de la population est constituée d’agriculteurs tandis que chez nous, les producteurs qui représentent près de 80% d’une population appauvrie évoluent sur des terres elles mêmes devenues pauvres et sans la moindre aide provenant de l’Etat. Cela est-il le reflet d’une absence de politique agricole dans nos pays ?
En effet, il est connu de tous que traditionnellement, en Afrique noire, les populations ont fait la preuve d’un sens élevé de la défense de leur survie. Les semences étaient offertes gratuitement à celui qui en demandait, le forgeron prêtait sans contre-partie sa daba à l’agriculteur etc. La production était alors perçue comme une activité stratégique pour les communautés qui lui apportaient toute forme de soutien.
De nos jours, nous observons le contraire et l’agriculture de nos pays ploie sous le poids des taxes qui lui sont imposées à travers les intrants et le matériel agricole. N’est-il pas curieux que pendant que chez les uns on subventionne, chez les autres on impose des taxes suicidaires ?
L’allègement de ces taxes, voire leur suppression ne pourraient-ils pas minimiser les effets pervers sur nos producteurs des subventions accordées de l’autre côté ? Pour qui connaît le rôle et la place de l’agriculture, ces questions méritent bien d’être posée. Principal facteur de développement des pays au Sud du Sahara, l’agriculture prend directement en charge au Burkina Faso l’avenir de près de 80% de la population : nourriture, éducation, santé etc.
Et si dans les pays développés l’industrialisation a accueilli de nombreux producteurs, chez nous il n’ y a presque pas d’alternative et dans ces conditions, il est évidemment difficile d’espérer un réel décollage de notre agriculture qui pourtant fait de plus en plus face à des impératifs de compétitivité sur les marchés régionaux et internationaux. La mondialisation oblige !
L’espoir d’une réelle implication de nos états dans ce combat contre les effets pervers des subventions américaines et européenne existe au regard des déclarations du Ministre burkinabé de l’agriculture. Monsieur Salif DIALLO, dans l’Observateur Paalga du 7 août 2002 reconnaît les conséquences d’une baisse des cours pour un pays comme le nôtre tant du point de vue de son économie que des modes de vie des populations rurales.
Monsieur le Ministre préconise trois types de solutions que sont :
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les négociations pour le paiement de compensations financières au profit des pays en développement victimes des subventions
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les négociations commerciales multilatérales sur l’agriculture dans le cadre de l’OMC
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le dépôt d’une plainte auprès de l’Organe de règlement des différends de l’OMC.
Pour mettre ces solutions à l’epreuve, il faut nécessairement que les organisations paysannes se concertent à l’échelle sous-régionale, régionale mais aussi que les Etats s ‘impliquent davantage en s’organisent eux aussi et se concertent à l’échelle sous-régionale.
L'UNPCB (Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina Faso)