Pour avoir des feuilles fraîches toute l’année : cultivons des baobabs dans notre jardin
Pensons à nos enfants : choississons le développement durable.
Le "Quimanpouuse" (Qui m'a poussé ?) ou les méfaits de l'alcool.
Pour avoir des feuilles fraîches toute l’année : cultivons des baobabs dans notre jardin
Quand vous entendez parler de baobab, vous pensez à cet arbre immense qui fait la richesse de certaines brousses. Et sans doute n’avez-vous jamais pensé à cultiver des baobabs dans votre jardin, comme vous cultivez des choux, des tomates ou de la salade.
Pourtant, avant de devenir grand, le baobab, comme tous les arbres de la brousse, commence par être une petite plante. Et nos chèvres et nos moutons ne se gênent pas pour les manger, s’ils les trouvent sur leur chemin.
C’est à partir de cette idée simple que Messieurs André Bationo et Marcel Nagalo (de la station de recherche de l’INERA, à Saria) ont tenté l’expérience. Ils ont semé des baobabs dans leur jardin, en les espaçant de 15 cm les uns des autres. Ce qui donne environ 50 baobabs par mètre carré (m2).
Évidemment, il n’est pas question de laisser grandir ces baobabs : au bout de 30 à 45 jours, ils sont assez grands pour être coupés (ils font déjà 40 à 60 cm de haut). Vous les coupez alors à 10 cm du sol (si vous les coupez à 5 cm, ils ne vont pas repartir aussi bien), et vous avez votre sauce pour nourrir votre famille, et pour vendre le reste au marché. Chaque mois (ou même toute les deux semaines), vous pouvez couper vos baobabs et récolter ainsi les feuilles fraîches dont vous avez besoin.
Bien sûr, pour faire pousser ainsi 50 baobabs par m2, il faut bien nourrir la terre. Il faut lui donner du bon compost (bien noir !), comme tous ceux qui font le maraîchage le savent bien.
Au Mali, du côté de Ségou, cette expérience est déjà bien avancée. 400 villageois ont déjà reçu des semences de baobabs pour essayer cette nouvelle façon de faire.
Chaque villageois a reçu de quoi faire un jardin de baobabs de 4 m de long sur 2 m de large (environ 400 baobabs). L’expérience a très bien réussie. Ainsi, Madame Tata Dembélé, du village de Nérékoro, au Mali, nous dit : « La sauce saga-saga faite avec les feuilles fraîches est délicieuse. Mon mari et les enfants l’adorent. »
Ces jardins de baobabs peuvent également sauver les géants de la brousse, qui tendent à disparaître dans certaines régions. En effet, trop souvent , les villageois coupent tellement les branches des baobabs de leur terroir, que ceux-ci ne peuvent plus porter de fruits. Quand les jardins de baobabs seront répandus dans nos villages, les grands baobabs de la brousse pourront garder leurs feuilles, fleurir, fructifier et se reproduire, au bénéfice de toute la brousse et de nos villages.
Têngembiiga
Pensons à nos enfants : choississons le développement durable.
Au moment où j’écris ces lignes, se tient le sommet mondial de Johannesburg, pour un développement durable. Pourquoi une telle rencontre ? Parce que la terre sur laquelle nous vivons est en danger ! La terre que nous habitons est vielle de plusieurs millions d’années. Les hommes l’habite depuis des milliers d’année. Nos ancêtres nous l’ont transmise « en bon état ». Dans quel état sera la terre que nous transmettrons à nos petits-enfants ? Que faire pour que dans cent ans, notre terre soit toujours habitable ? C’est à ces questions que les représentants de tous les pays du monde essaient de répondre à Johannesburg ?
Pour bien comprendre, regardons d’abord ce qui se passe dans notre village. Nous voulons que la vie de nos enfants soient belles, et même meilleure que la nôtre ? Et pour cela nous travaillons dur ? Mais sommes-nous sûrs de suivre le bon chemin ?
Sur le plateau mossi, quand nous interrogeons les anciens de notre village, ils sont unanimes à dire qu’autrefois les terres cultivées n’étaient pas fatiguées comme celles que nous cultivons aujourd’hui. Ou bien, quand elles étaient fatiguées, on les laissaient se reposer 10, 20, ou même 30 ans. Mais maintenant, la population est devenue trop nombreuse. Si tu veux laisser une terre se reposer, quelqu’un veut te la prendre !
Plus au sud, ce n’est pas beaucoup mieux. La semaine passée, en rentrant de Bobo-Dioulasso, je me suis arrêté dans quelques villages pour causer avec les paysans. Nous avons justement essayer de réfléchir sur le développement durable. Pour les y aider, je leur ai posé cette question : « Pensez-vous que vos enfants (et vos petits-enfants) pourront rester au village et cultiver les mêmes terres que vous ? A chaque fois, le groupe de paysans avec lequel je bavardais a commencé par rester un long moment en silence. On sentait une certaine inquiétude. Puis l’un d’entre eux a pris la parole pour dire à peu
Prenons un autre exemple. Quand un paysan plante un arbre, il n’est pas sûr d’en profiter lui-même. Mais il peut espérer que ses enfants en profiteront. Par contre, s’il part en brousse, au bord du marigot, pour y abattre un arbre, le découper et vendre le bois au bord de la route (ou aux dolotières pour payer ses dettes !), ce n’est pas pareil. Cet arbre (qui a mis des années à pousser) lui a fait gagner quelques francs, mais il a disparu à tout jamais. Ses enfants n’en profiteront pas.
Voici un autre exemple. La semaine passée, en rentrant de Bobo-Dioulasso, je me suis arrêté dans quelques villages pour causer avec les paysans. Pour les aider à comprendre ce qu’est le développement durable, j’ai posé la question suivante :
« Pensez-vous que vos enfants pourront cultiver les mêmes terres que vous ? »
A chaque fois, le groupe de paysans avec lequel je m’entretenais est resté en silence. On discernait même une certaine anxiété. Puis l’un d’eux a pris la parole.
« C’est une question difficile. Nos parents nous ont laissé une bonne terre. Quand nous avons commencé à faire du coton, nous avons fait jusqu’à 3 tonnes à l’hectare, sans engrais, et sans compost. Puis le rendement a baissé. Nous avons mis de l’engrais chimique. Le rendement est remonté, puis il a recommencé à baisser. Une année, nous n’avons pas dépassé une tonne à l’hectare. Maintenant, nous faisons du compost. Dans les champs où nous mettons le compost, nous faisons 5 tonnes à l’hectare, parfois deux tonnes. Seulement nous n’avons pas assez de compost pour en mettre sur tous nos champs, si bien que le rendement continue à baisser. C’est ça qui nous fait peur pour nos enfants : Nous ne savons pas si nos enfants pourront rester sur nos terres. Avant beaucoup partaient en Côte d’Ivoire. Mais maintenant, là-bas aussi la vie est devenu difficile.»
Quand un paysan améliore la vie de sa famille (il construit une belle maison, ses enfants vont à l’école, au collège…) et ses terres restent bonnes : c’est le développement durable.
Mais quand un paysan gagne assez d’argent pour construire une belle maison, s’acheter une mobylette… mais que ses champs se fatiguent d’année en année, que les rendements baissent, ce n’est pas le développement durable. Ce paysan devrait être inquiet pour ses enfants, et donc changer sa façon de faire.
Souvent, la première chose à faire (si on fait déjà du compost) c’est d’introduire la rotation des cultures. La plupart des producteurs de coton que nous avons rencontrés ne faisaient que deux cultures sur un même champ : du coton la première année, et du maïs la deuxième année. Puis à nouveau du coton la 3° année. Or nous venons de voir que cette façon de faire fatigue la terre. Cherchons une autre façon de faire qui fatigue moins la terre. Pratiquons, partout, la rotation des cultures : au moins sur 3 ans ; et mieux encore sur 4 ans.
1° année : Arachide ou/et Haricot | 1° année Coton |
2° année Sorgho | 2° année Maïs |
3° année Coton | 3° année Arachide ou/et Haricot |
4° année Maïs |
Essayez, et vous verrez que vos terres vont moins se fatiguer ; et vous gagnerez autant d’argent pour les besoins de votre famille.
Cultiver, nourrir sa famille, élever ses enfants sans fatiguer la terre (pour que ses enfants puissent faire de même), c’est ça le développement durable.
Dugulen
Le "Quimanpouuse" (Qui m'a poussé ?) ou les méfaits de l'alcool.
Traduit de la revue « Sanje wi », en lyele, de Réo.
Une liqueur très forte et qui ne coûte presque rien. Après l’avoir bu, ça te change complètement le visage, comme si tu viens de recevoir une gifle. Cette liqueur a beaucoup de noms : "quimanpousse, sopal, akouété, aide-moi à mourir, toèlein-toèlein, bousculator, ..." Cette boisson va vraiment aider nos vieillard à rendre l’âme, et elle n’oubliera pas de réserver un avenir regrettable à nos jeunes filles et à nos jeunes gens.
Cette liqueur a envahit le pays. Tout le monde est conscient de cela et l’on se pose la question : est-ce pour l’embellir ou pour le gâter ? Que chacun de nous jette un regard critique autour de lui, et il verra le résultat.
Tous les coins et les alentours de Réo en particulier, et du pays en général, ont des lieux aménagés et animés spécialement pour la vente de ce fameux produit alcoolisé. Et chaque soir, au son de la musique, les gens se retrouvent comme des abeilles dans ces lieux pour consommer. On y trouve : hommes, femmes, jeunes gens, jeunes filles. Le plus grave, peut-être, c’est que nos produits traditionnels, comme le dolo, sont pris avec cette liqueur. Parfois, elle remplace même notre bouillie !
Que pensons-nous de cette liqueur ?
Au Sanje wi nous sommes très tristes quand nous voyons cette consommation excessive de cette boisson. Nous avons envoyé quelqu’un faire une enquête auprès des vendeurs et des consommateurs. Nous voulions savoir ce que cette boisson apporte au consommateur, et aussi ce qu’elle rapporte au vendeur. Ensuite, nous avons été interroger un docteur pour lui demander les conséquences de cette consommation sur la santé.
Écoutons le point de vue d’un vendeur !
Sanje wi : Quel intérêt vous apporte le Quimanpousse (Sopal) en le vendant ?
Le vendeur : Sincèrement, moi je ne bois pas le Sopal pour en connaître le goût. Ce que je sais, c’est qu’un jour je suis allé chez un grossiste pour en acheter, et qu’il me l’a fait goûter. Mais je vous assure qu’après l’avoir avalé, moins une, je n’arrivais pas à destination.
Sanje wi : Combien vous rapporte une bouteille ? et combien de bouteilles vendez-vous dans une journée ?
Le vendeur : J’achète la bouteille à 400 F ou 425 F. Une bouteille contient 42 ( ?) boules, et nous vendons 3 boules à 50 F. Je peux donc avoir un bénéfice de 150 F dans une bouteille. Et je peux vendre plus de 10 bouteilles par jour. Si c’est le jour du 21 de Réo (le dimanche qui coïncide avec le marché), le bénéfice est inimaginable.
Sanje wi : Vous n’en consommez pas, et vous en vendez ! Pourquoi cela ?
Le vendeur : Ne m’interrogez pas ainsi ! Moi je cherche l’argent, je m’en fous du reste ! Observez bien dans la ville de Réo. Il y a combien de boutique où on ne vend pas ces liqueurs ? Moi personnellement, je ne supporte pas l’alcool, surtout le Sopal. Mais si quelqu’un vient en demander, je lui en donne, et je prends mon argent, c’est tout !
Ensuite, Sanje wi s’est approché des consommateurs fidèles du Sopal et les a intervewés :
Sanje wi : Pourquoi les gens aiment-ils cette boisson beaucoup plus que les autres ?
Un consommateur : « Quoi ? Le Quimanpousse ? Mais, c’est très moins cher ! Et quand tu en prends un peu seulement, ça te suffit. Moi si je prends un quart de litre, c’est jusqu’au soir que j’en prends encore. »
Un autre consommateur : Moi si je me lève le matin, tout mon corps est lourd. Mais si je prends un verre de Sopal, mon corps devient très léger comme une feuille. En ce momment, je peux faire ce que je ne pouvais pas faire. Ça, ce n’est pas de l’amusement, hein !
Un autre consommateur (jeune) : Hé djah ! Ne vous fatiguez pas. Moi, là où je suis là, le bien que le Sopal m’a fait la nuit de Pâques, c’est Dieu seul qui le sait. Je n’avais pas beaucoup d’argent en poche et j’ai rencontré une de mes gazelles en pleine ville. Vous savez ce que j’ai fait ? Je l’ai emmené dans un petit coin et j’ai pris une bouteille de Sopal. Je vous dis qu’on a même pas fini la bouteille et la fille était K.O. (soûle). Immédiatement, je l’ai tiré dans un autre coin sombre et hop… j’ai fini avec elle !
Sanje wi : Dans un état pareil, est-ce que tu as pu utilisé un préservatif ?
Le jeune homme : Quel préservatif ? Moi-même j’étais soûl !
Sanje wi s’est approché du docteur Thio, le Médecin chef du Centre Médical du Sanguié et lui a tendu son micro. Ecoutez-le.
Docteur Thio : L’excès d’alcool ne fait jamais de bien à une personne. Quand tu bois, tu es fier sur place. Et cette fierté peut te conduire à faire du mal, à faire ce que tu ne devais pas faire, et même ce que tu ne voulais pas faire. Si tu consommes trop d’alcool, il y a des conséquences immédiates, et d’autres dans l’avenir.
Quel mal immédiat peut faire le Sopal ?
Docteur Thio : Si quelqu’un consomme excessivement le Sopal, cela peut entraîner un arrêt brusque du cœur (crise cardiaque) et la personne meurt sur place. L’abus de l’alcool peut entraîner un chauffeur (ou un motocycliste) à un accident de circulation qui peut souvent occasionner des morts ou des blessés graves. L’alcool peut donner des plaies au foie.
L’alcool peut t’entraîner à avoir des relations sexuelles alors que tu ne devais pas. Et si cette personne a le sida ou une autre maladie sexuellement transmissible… on ne sait jamais.
Sanje wi : Et à la longue, qu’est-ce que le Sopal peut faire à une personne ?
Docteur Thio : J’ai bien dit que le Sopal donne des plaies au foie, et ces plaies se terminent par la mort. L’alcool ralantit la respiration et le battement du cœur de la personne. Ça donne également une maladie aux reins qui ne leur permet plus de fonctionner. L’alcool donne aussi la cirrhose du foie. Lorsque le foie est atteint, ça devient un cancer du foie, et ce cancer se termine toujours par la mort comme vous le savez tous.
L’alcoolique devient comme un enfant, agit comme un fou, il devient ignorant, il ne respecte plus rien, ni personne. Et prêtez bien l’oreille à ce que je vais vous dire maintenant : l’homme qui consomme trop d’alcool ou d’autres liqueurs, finit par perdre sa virilité. Il ne peut plus avoir d’enfant, car l’alcool détruit la qualité des spermatozoïdes. Ou encore, il peut avoir un enfant, mais cet enfant est mal formé, idiot… c’est un monstre au lieu d’être un être humain. Tu peux avoir un enfant avec une petite tête comme le poing. Ce genre d’enfant ne peut pas réussir à l’école, ni faire les travaux physiques à la maison.
Pour les femmes aussi, c’est très dangereux également : elles peuvent devenir stérile à vie. Ce sont là les séquelles de la consommation excessive de Sopal et de tous les alcools.
Sanje wi : Docteur, ce que vous venez de dire fait vraiment peur. C’est très inquiétant. Mais quel conseil donnez-vous à nos lecteurs, et aux fervents consommateurs de ces liqueurs, et à nos jeunes frères et sœurs tentés par la consommation du Sopal.
Docteur Thio : Ce n’est pas seulement le Sopal, mais aussi bien toutes les autres liqueurs qui sont dangereuses. Pour ma part, si j’ai un conseil à donner, surtout aux jeunes gens et aux jeunes filles, je leur dirais de faire très attention à la consommation abusive d’alcool, que sont ces liqueurs. Ces jeunes sont appelés à devenir l’élite du pays, les bras valides de la société. Le monde de demain leur appartient ; c’est pour eux. Je leur conseille donc de réduire fortement leur consommation d’alcool : surtout de Sopal et des autres liqueurs. Si la consommation ne baisse pas, on ne verra plus de jeune vaillant, ni d’enfant docile dans cette génération. On n’aura plus d’adulte solide, ni de sage vieillard. Les enfants à naître seront idiots, mal formés, comme je l’ai dit plus haut. Quel sera notre monde alors ?
Voilà le vibrant appel que je lance à tout un chacun. Celui qui peut cesser complètement de boire ces liqueurs, n’a qu’à cesser ! Celui qui ne peut pas cesser complètement, qu’il réduise fortement sa consommation d’alcool. A bon entendeur, salut !
Sanje wi : Merci doctheur Thio.
Docteur Thio : Merci, et courage !