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Quand les producteurs de riz burkinabè découvrent 

qu’ils doivent se faire commerçants.

 L'Etat, puis les commerçants se détournent du riz burkinabè

J’ai eu l’occasion ces derniers mois de rencontrer des producteurs de riz de différentes régions du Burkina : de Bama, de Banzon, de Koupéla, de Bagré, du Sourou… Partout les producteurs de riz se plaignent : Ils n’arrivent pas à vendre leur riz à un juste prix. Ce que les commerçants leur proposent ( 85 F le kilo de riz paddy ) ne les arrangent pas.

C’est au Sourou que la situation est la plus désespérée, car c’est au Sourou (notamment à Nyassan) que la redevance pour l’eau est la plus forte : 100 000 F par saison de culture (donc deux fois par an) et par hectare. De ce fait, leurs coûts de production s’élèvent à 83 F par kilo de riz paddy (ce chiffre est celui d’une étude publiée par le CNRST dans leur revue Eureka). Accepter de vendre leur riz au prix proposé par les commerçants, c’est travailler dur pour ne rien gagner.

Et pourtant, c’est ce que les producteurs du Sourou sont amenés à faire pour une bonne partie de leur récolte s’ils veulent obtenir les intrants pour la saison de culture suivante. Depuis que la SONACOR, SODEGRAIN et maintenant SOPROFA les ont abandonnés.

Les producteurs de riz du Sourou ont commencé à s'occuper de commercialiser leur riz

De cette situation les producteurs du Sourou  ont tiré une leçon : de plus en plus les producteurs doivent s’organiser en coopératives, et ces coopératives doivent s’occuper de la commercialisation, pour l’achat des intrants, ce qu’elles faisaient déjà, mais aussi pour la vente de leur riz. Et donc pour ne pas laisser tout le bénéfice de ce commerce aux commerçants.

C’est ainsi que les producteurs du Sourou, ont essayé de se constituer un marché sur Koudougou et Dédougou. Pour cela ils ont utilisé des radios FM de Koudougou et Dédougou pour se faire connaître. Ils ont réussi à vendre une certaine quantité de riz, mais ils ont découvert aussi que s’ils voulaient que les commerçants leur achètent régulièrement leur riz, il fallait qu’ils soient mis dans des sacs facilement reconnaissables. D’où les nouveaux sacs bien reconnaissables. Des affiches aussi ont été confectionnées. 

Mais cela ne suffit pas. Un commerçant de Ouaga a refusé ce riz car il a trouvé qu’il y avait trop de brisures, et surtout trop de fines brisures. D’où la nécessité d’utiliser une machine performante pour décortiquer le riz. Le riz décortiqué, il faut maintenant séparer les grains entiers de la brisure, et vendre les deux séparément.

A Koudougou, c'est le riz paddy qui se vend le mieux !

Quand nous avons ouvert notre magasin de riz du Sourou à Koudougou, nous avons commencé par faire venir 3 tonnes de riz blanc décortiqué, et quelques sacs de riz paddy. A notre grande surprise, c'est le riz paddy qui est parti en premier. Nous avons fait une nouvelle commande de riz paddy qui s'est également bien venu. Ce riz est acheté par des femmes qui vont l'étuver dans leur marmite, avant de le faire décortiquer au moulin. Elles obtiennent donc du riz étuvé, appelé souvent "riz américain" car il se présente alors comme le riz "parboiled", comme celui qui est commercialisé par une ONG bien connue au Burkina ! 

Les producteurs de riz du Burkina Faso sont doublement pénalisés

Quand les producteurs de riz décortiquent directement leur riz paddy, et le vendent sous forme de riz blanc décortiqué, ils subissent la concurrence directe du riz blanc thaïlandais, ou autre, importé à bas prix (car il s'agit souvent de vieux stocks ou encore de brisure de riz). 

Quand les producteurs de riz  vendent aux femmes leur riz paddy pour qu'il soit étuvé, ce riz de qualité trouve sur son chemin le riz américain "monétisé" par une ONG américaine, qui de plus a les moyens de faire des campagnes publicitaires sur la télévision nationale pour vanter la qualité de son riz. Et elle ne s'en prive pas : c'est ce que nous voyons tous les jours en ce mois d'août. 

Pourtant l'exemple de la Guinée est tout à fait significatif. La filière riz du Burkina doit absolument s'organiser pour étuver davantage son riz. Il se vendra mieux, et sera plus nutritif. Au profit de tous : producteurs et consommateurs. 

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