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L'exemple de la Guinée :

Grâce au riz étuvé, les importations de riz 
ont diminué de moitié

 

 01/09/2002 ( Guinée )
Abdoulaye Diari Diallo


(Syfia Guinée) En Guinée, une simple amélioration technique de l'étuvage du riz réduit considérablement la consommation du bois de chauffe et assure le succès du riz local. (Article offert par Syfia)

" Etuver sans détruire, sans déshydratation et surtout sans brûlure ", tel est le credo de Mme Mabinty Soumah, étuveuse de riz en Guinée. " Je ne connais que ce travail pour nourrir les 15 personnes qui sont à ma charge. Mon revenu est supérieur à celui d'un cadre supérieur. Par mois, je peux gagner jusqu'à 300 000 Francs guinéens" (157 euros en 2002, soit alors environ 100 000 F CFA), clame fièrement cette dame d'une trentaine d'années, très satisfaite de la nouvelle technique d'étuvage du riz diffusée par le Projet d'appui à la sécurité alimentaire (Pasal), financé par la Coopération française.

L'étuvage du riz local est une technique traditionnelle en Guinée. Ce procédé de pré-cuisson du paddy donne un riz savoureux et qui gonfle mieux à la cuisson. Après trempage dans les cours d'eau ou dans de grandes bassines durant 2 ou 3 jours, le riz égoutté est mis à étuver dans un fût avec de l'eau jusqu'à ce que la vapeur apparaisse en surface. Puis il est séché à l'air libre et décortiqué. Une technique longue et contraignante, risquée pour les femmes qui se brûlaient souvent, et grosse consommatrice de bois.
Aujourd'hui toutes ces opérations sont pratiquées dans un même fût, doté d'un couscoussier, qui peut contenir 200 kg de riz. Muni d'un robinet pour vider l'eau après le trempage, d'un système de basculement qui facilite le transvasement du riz, ce fût est posé sur un foyer amélioré qui économise le bois et concentre la chaleur. L'eau bout plus rapidement. En une demi-journée, les femmes peuvent étuver 200 kg de riz alors qu'il leur fallait trois jours auparavant. Une fois séché sur des bâches, le riz est décortiqué et prêt à la vente.

Une technique vite adoptée

Cette nouvelle technique s'est diffusée très rapidement auprès des femmes. " Nous venons d'abord suivre à Conakry une formation de 3 jours à l'utilisation de cette étuveuse au Pasal. C'est seulement après avoir maîtrisé l'utilisation du matériel qu'on se le procure à 150.000 Fg' (115 euros) ", confie Mme Bintou. Grâce à une convention passée entre le Pasal et le crédit rural de Guinée, les étuveuses bénéficient de crédits pour acheter le matériel et le paddy. Cette campagne, chaque femme pourra obtenir un prêt de 600 000 Fg (540 euros) pour se procurer sa matière première pendant la période d'abondance. Les fûts spécialement conçus sont fabriqués par des forgerons, qui ont, eux aussi, été formés par le projet. Ils sont ensuite transportés gratuitement jusqu'à leurs destinataires. " Pour la confection du matériel, nous avons été initiés non seulement à la fabrique mais aussi à la maintenance ", explique, Bailo Kanté, forgeron à Conakry.
Depuis 1999, cette innovation technique simple a été adoptée dans 40 localités guinéennes des régions rizicoles où 200 foyers améliorés sont actuellement utilisés. Les femmes étuveuses ne sont pas les seules à lui trouver des avantages. D'après Lucien Gomou, technicien forestier, dans ces zones, la consommation de bois de chauffe a considérablement reculé. Les femmes qui achetaient 1000 Fg de bois pour l'étuvage de 200 kg n'en achètent plus que pour 200 Fg. Un foyer amélioré utilise pratiquement le cinquième d'un feu traditionnel. Avant, 10 camions de bois de chauffe débarquaient chaque semaine en moyenne dans la localité de Koba-Boffa, en Guinée maritime à environ 80 km de la capitale. Maintenant deux camions suffisent. " Si chaque étuveuse guinéenne utilisait cette nouvelle technique, on sauverait 40 hectares de forêts par jour ", estime un forestier.
 
Les  importations de riz ont diminué de moitié
 
Cette nouvelle technique permet aussi d'améliorer la qualité du riz mis sur le marché. Moins de brisures, moins de corps étrangers tels que des cailloux, un riz plus propre " qui rassure les Guinéens ", confie le docteur Bangoura, du CHU de Donka. Auparavant, les consommateurs étaient nombreux à bouder le riz local accusé de provoquer l'appendicite, même s'ils préféraient son goût à celui du riz asiatique. Le commissaire Sylla, du port de pêche de Conakry, reconnaît avoir abandonné le riz importé au profit du riz du pays. Il n'est pas le seul. Aujourd'hui des marchés de riz local se sont créés dans tous les coins de la Guinée. Selon les statistiques officielles, l'importation du riz a chuté de 600 000 t à 300 000 t ces dernières années tandis que la production nationale, en forte augmentation, dépasse aujourd'hui les 800 000 t. Désormais le goulet d'étranglement n'est plus l'étuvage mais le décorticage. Au nord de la Guinée, à la frontière bissao-guinéenne, l'introduction d'étuveuses a échoué parce qu'il n'y avait pas de décortiqueuse à riz dans la préfecture.
Quatre nouveaux forgerons ont été formés cette année pour fabriquer de nouvelles étuveuses. Du matériel neuf, et non des matériaux récupérés dont la qualité laissait à désirer, sera désormais utilisé. Des améliorations seront apportées au fût comme la fixation d'un robinet sur l'étuveuse. Des magasins des pièces détachées sont par ailleurs accessibles dans tout le pays..
Le Pasal a pris fin en juin 2002. Certains s'inquiètent déjà d'un retour possible aux vieilles habitudes. Mais c'est faire fi de l'expérience des étuveuses, comme l'explique cette vieille femme de Conakry : " Les femmes se sont appropriées cette nouvelle technique améliorée d'étuvage. Il est hors de question de renouer avec l'ancien système ".

 

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