A vendre : pays pauvres.
Il y a un mois nous avons déjà évoqué ce thème avec le n° 309 : Main basse sur les terres agricoles. La menace se faisant de plus en plus pressante, nous y revenons. Avec humour, parfois les burkinabè plaisantent entre eux : « Notre chance, c’est d’être pauvres. Nous n’avons pas de pétrole, pas de grandes richesses minières connues. Les grandes puissances nous laissent tranquilles. Nous vivons dans la paix. » Mais voici que cette nouvelle menace concerne, en premier lieu, les pays pauvres. Le Burkina pourra-t-il y échapper ?
A vendre : pays pauvre
Affalé sur le canapé, je lis « Le Nouvel observateur » quand, tombant sur un article intitulé « A vendre : pays pauvres » mon sang n’a fait qu’un demi tour. Et figurez-vous, on y fait mention du Congo, une fois de plus. Le pays dans lequel je suis né est à vendre ; sapristi la malédiction se poursuit !
La Chine est prête à bondir sur un million d’hectares de terre pour y faire une agriculture intensive afin de nourrir son milliard d’habitants. Pendant ce temps, l’œuf et la farine de manioc que l’on mange à Brazzaville proviennent respectivement du Cameroun voisin et du Congo-Démocratique ; allez donc comprendre !
Les politiques préfèrent remplir les greniers de munitions pour nourrir les « Kalachs » (2500 CFA la cartouche, l’équivalent d’un déjeuner d’une famille de cinq personnes).
Une question a resurgi dans ma frêle conscience : que vont devenir les populations déjà pauvres qui ont toujours occupé ces terres depuis des générations ? La réponse est simple : les villageois congolais seront tout simplement chassés de leur village puis leur bicoque rasée.
Une prétendue liberté était acquise en août 1960. Le résultat de nos jours pousserait Simon Kimbangu, André Matsoua… à se retourner plusieurs fois dans leur tombe.
De quoi sont faites les cervelles de nos « politichiens » ?... D’asticots peut-être, ou de fientes de colombes. « Après moi le déluge ! », c’est ce qu’ils doivent se dire.
Les grandes nations de ce monde ont vu différentes personnalités qui ont pris le flambeau, se sont sacrifiées pour que les générations futures puissent accéder au bien être, mais nous figurons toujours dans les annales de la pénombre.
Une véritable république ne s’est jamais instaurée ; pour ceux qui ont eu la chance de sortir hors des frontières congolaises, attendons-nous à plus de bips téléphoniques de la part de nos anciens collègues de classe, nos anciens voisins, notre famille dans toute son élasticité :
- « Rappelle-moi d’urgence… ! »
- « Alors qu’est ce qui ne va pas ? »
- « Fais-moi un " western union " tout de suite sinon tu apprendras que je suis mort ! »
En tout cas à nos politiques je dirai : vous avez été formés par le colon blanc qui vous a donné des fournitures scolaires gratuites, des bourses d’études, la sécurité sociale et plein d’autres avantages que vous vous rappelez parfois nostalgiquement en comparaison avec notre génération. Vous avez vendu le pétrole sur trente ans, le bois,… Moi et mes frères nous avons eu la « Kalach » et nous nous sommes entretués pour perpétuer l’opulence dans laquelle vous voulez toujours vivre sans effort : Alors pardon, ne vendez pas le Congo !
Cégang (source : Mwinda )
Maurice Oudet