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Conte gouin par Mme Justine Fayama 11. Le chien et le singe |
Autrefois, le chien et le singe étaient de véritables amis. Ils faisaient tout ensemble : ils se promenaient ensemble, ils se confiaient leurs secrets, c’était une vraie amitié. Une affaire de femme va les transformer en de véritables ennemis. Le chien est fiancé à une fille d’un village voisin. Un jour, il demande à son ami de l’accompagner dans la belle-famille. Il faut traverser un petit marigot avant d’y arriver, mais ce marigot est à sec. Arrivés au marigot, le chien demande à son ami de l’aider à creuser un trou pour qu’ils puissent boire à leur retour. Le singe refuse en lui disant qu’il ne veut pas se salir. Le chien commence à creuser et le singe part en le laissant travailler. Le chien ne se décourage pas. Il fait son travail. Après avoir atteint l’eau, il repart et arrive au village. Il trouve son ami en pleine causerie avec sa fiancée. Il ne dit rien, les salue et s’assoit à côté d’eux ; ils causent ensemble. Un moment donné, le chien demande à sa fiancée de rentrer avec lui, mais elle répond qu’elle ne veut plus de lui, qu’il est sale, qu’elle veut le singe. Commence alors une dispute et le chien, rouge de colère, rentre chez lui. Arrivé au lieu où il s’était sali, il boit et se repose. Il entre ensuite dans le trou d’eau qu’il avait creusé mais laisse les derniers poils de sa queue flotter à la surface. Quelque temps après, le singe, tout assoiffé, arrive et veut boire de cette eau. Quand il se penche pour boire, le chien avance sa queue. Le singe l’écarte de la main sans savoir que c’est la queue du chien. Le jeu se répète à plusieurs reprises jusqu’à ce que le singe décide d’enlever cette saleté pour boire à son aise. A sa grande surprise, c’est le chien qu’il fait sortir, et une lutte commence entre eux. Le chien mord le singe de tous côtés, le singe crie au secours en appelant sa mère, son père; il crie, crie, et ses cris attirent l’attention de la panthère. A la vue de la panthère, le chien prend peur et, tout tremblant, se met la queue entre les jambes. Le singe tremble aussi. « Pourquoi faites-vous tant de bruit ? », demande la panthère. « C’est mon ami qui a détourné ma fiancée. » Et le chien lui raconte toute l’histoire. La panthère lui dit : « Attrapez-vous pour la lutte. » Le chien attrape le singe et le jette par terre. Le singe se met à chier de peur. « Prends ses selles et mange-les ! », dit la panthère. Le chien mange les déchets du singe et part en pleurant. Il rencontre le bouc qui lui demande : « Pourquoi pleures-tu ? » Le chien raconte sa mésaventure au bouc qui lui dit : « Retourne là-bas, on va voir. » Ils retrouvent le singe et la panthère. La panthère dit : « Attrapez-vous ! » Et une fois encore le chien jette par terre le singe qui se met à chier. La panthère dit : « Chien, mange ça ! » Le chien regarde le bouc qui lui dit : « Pourquoi me regardes-tu ? Prends et mange ! » Notre malheureux chien mange les selles du singe et s’en retourne en pleurant ; en chemin, il croise l’âne qui lui demande la cause de ses pleurs ; il lui raconte sa mésaventure. L’âne lui dit : « Retourne, j’irai voir cette panthère ! » Le chien retourne et l’âne le suit. La panthère et le singe étaient toujours là. La panthère dit : « Allez, attrapez-vous! » Une fois de plus, voilà le singe par terre qui chie plus que les autres fois. La panthère dit au chien : « Prends et mange ça vite ! » Le chien regarde l’âne qui lui répète les mêmes paroles que le bouc. Notre malheureux chien est obligé d’exécuter encore une fois la demande de la panthère. Il repart ensuite en boudant : « Si je rencontre qui que ce soit, même le lion, je ne retourne pas là-bas ! J’ai le ventre rempli des selles du singe ; si j’avais continué mon chemin, je n’aurais pas le ventre ballonné ainsi! » Alors qu’il réfléchit ainsi, il rencontre le bélier. « Qu’est-ce qui t’est arrivé pour avoir le ventre aussi ballonné? » Et notre chien de lui raconter toute son histoire jusqu’à l’âne. Le bélier lui dit de retourner là-bas, mais il refuse. Le bélier insiste tellement qu’il finit par accepter. Le voilà maintenant qui dandine comme un canard derrière le bélier. La panthère et le singe sont toujours là. Le bélier dit : « Panthère, que s’est-il passé ? » « C’est moi qui dois te poser la question ou c’est toi ? » dit la panthère. « J’ai croisé le chien pleurant et le ventre enflé; je lui en ai demandé la cause et il m’a dit que tu l’avais obligé à manger les selles du singe. Je l’ai ramené ici pour voir ça de mes yeux. » La panthère dit : « Singe, attrapez-vous ! » Comme les autres fois, le chien le jette par terre et les selles du singe sont plus abondantes que les fois passées. La panthère, comme les autres fois, dit : « Chien, mange ça ! » Le bélier : « Ne mange pas ça ! » « Mange ça ! » « Ne mange pas ça ! » « Mange ça! » « Ne mange pas ça! » C’est comme une chanson entre les deux grands. A la fin, les deux protecteurs commencent à se battre. Ils se déchirent, ils se griffent, sans pouvoir terrasser ni l’un ni l’autre. Fatigués, essoufflés, ils se regardent. La panthère dit au singe : « Va dans la case fétiche de mon père, prends les vieilles griffes suspendues au mur et reviens vite. Ne t’arrête pas en chemin pour goutter à aucun fruit. Va et reviens vite ! » « J’ai compris, je reviens vite », dit le singe. Le bélier à son tour envoie le chien en lui disant de déterrer tous les os qu’il verra en route. Comme le singe, le chien part en flèche. Le chien ne s’est pas arrêté en route. Après quelques temps, il ramène les vieilles cornes du grand-père bélier, mais le singe a fait le contraire de ce qui lui était demandé. En chemin, il a vu des lianes bien rouges et il n’a pas pu s’en passer. Il est grimpé en chantant, cueillant et mangeant, sans se soucier de la panthère. Le bélier, avec ses cornes, déchire la panthère jusqu’à ce qu’elle fasse. Passant près du buisson où est le singe, la panthère entend des chansons; levant la tête, elle voit le singe, s’approche et lui dit : « Coupe-moi cette liane-là! » Le singe, tout tremblant, lui demande en en désignant une : « Çà ? » Elle dit non. Il en montre une autre, la panthère dit non; une troisième, elle dit toujours non. Brusquement, elle saute et coupe la liane qu’elle veut : ce sont les testicules du singe! Puis elle continue son chemin. Ce sont ces cicatrices noires qu’on retrouve sur la peau de la panthère. Or, à l’intérieur d’une termitière, vit une tortue. La tortue, en voyant couler le sang du singe, commence à chanter : « Depuis que je suis née, je n’ai jamais vu une pluie de sang. » Son chant attire l’attention du singe qui descend à l’intérieur de la termitière. En voyant la tortue, il lui dit : « Je vais te manger car j’ai une faim de loup! Va vite chercher du feu, je vais te griller, mais ne vas pas chez le chien : va plutôt chez le coq et reviens vite. » La tortue part aussitôt, mais va chez le chien. Elle explique son malheur au vieux chien qui lui remet une peau d’animal contenant un jeune chien. De retour, la tortue chante : « Je suis allée chez le père coq qui m’a remis une queue pour chasser les mouches. » Elle dépose le feu, ramasse du bois mort et allume le feu. Le singe la prend et la jette dans le feu, mais elle sort ; il la jette encore, elle ressort, une fois, deux fois, trois fois. La quatrième fois, dame tortue se précipite sur la peau que lui a remise le chien, l’ouvre et en fait sortir l’ennemi principal du singe. Notre singe ne sait plus attendre; il prend la fuite, poursuivi par le chien. Si le singe monte sur un arbre, le chien monte; s’il descend, il descend. Fatigué, le singe fait une prière : « Seigneur, je t’en prie, sépare-nous; que l’un reste à terre et l’autre en haut ! » Dieu a entendu sa supplication. Depuis ce jour, le chien ne peut plus grimper aux arbres.
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