L'exemple du coton.
Le Burkina Faso, premier producteur de coton d`Afrique subsaharienne mais sans accès à la mer, va exporter sa production via les ports de Tema et de Lomé et non plus d'Abidjan à cause de la crise postélectorale ivoirienne, a-t-on appris mercredi (le 19 janvier 2011) de source officielle.
« A cause de la crise (en Côte d`Ivoire), nous détournons l'évacuation de notre coton vers les ports de Lomé (Togo) et de Tema (Ghana). Ça fait naturellement des frais supplémentaires », a déclaré à la presse Célestin Tiendrébéogo, directeur général de la Société des fibres et textiles du
Burkina Faso (SOFITEX), la principale société cotonnière du pays.
« Aujourd`hui nous ne pouvons pas apporter ces marchandises au port d`Abidjan parce qu`il y a un risque potentiel que ce coton ne soit pas exporté pour un problème de navire ou même qu'on ne trouve pas toute la sécurité nécessaire au niveau des installations portuaires», a-t-il fait valoir.
Selon lui, les surcoûts atteindront 25 FCFA (1 EUR = 656 FCFA) par kilogramme de fibre de coton.
Le port d`Abidjan, débouché maritime par lequel le Burkina Faso mais aussi le Mali et le Niger, pays enclavés d`Afrique de l`Ouest, exportent et importent des marchandises, a servi au cours des deux dernières années à l`évacuation de 60% du coton burkinabè.
Le Burkina qui exporte 80% de son coton vers la Turquie et les pays d`Asie en a produit cette année 475.000 tonnes, en baisse par rapport aux 530.000 tonnes de 2010.
Quelques 20.000 tonnes de marchandises burkinabè sont en ce moment bloquées au port d`Abidjan, selon des sources proches du Conseil burkinabè des chargeurs (CBC).
Le port d`Abidjan fait partie des onze "entités" économiques ivoiriennes sanctionnées par l`Union européenne qui a reconnu, comme la quasi-totalité de la communauté internationale, Alassane Ouattara vainqueur de la présidentielle du 28 novembre en Côte d`Ivoire, et demande au chef d`Etat sortant Laurent Gbagbo de quitter le pouvoir, ce qu`il refuse.
Les producteurs de coton burkinabè ne devraient pas attendre pour poser la question :
« Qui va payer ce surcoût ? » Nul doute que la Sofitex sera tentée de faire payer ce surcoût par les producteurs en supprimant le reste de la ristourne additionnelle qui doit encore leur revenir.
Je m’explique.
Le 19 novembre 2011, donc avant les résultats des élections présidentielles en Côte d’Ivoire, l'Association interprofessionnelle du coton du Burkina (AICB) a annoncé jeudi soir à Bobo-Dioulasso le paiement anticipé d'une partie de la ristourne additionnelle (18 F CFA) de la saison cotonnière 2010-2011, ce qui portera le prix du kilogramme de coton graine de premier choix de 182 à 200 F CFA.
Au regard de l'embellie actuelle du cours du coton, l'AICB, structure composée des sociétés cotonnières et des cotonculteurs, veut galvaniser les producteurs, en anticipant cette année sur le paiement de la ristourne additionnelle.
Cette ristourne devait être reversée aux producteurs en mai 2011. Mais l'AICB a voulu dès maintenant verser une partie aux bénéficiaires, car "le cours du coton est bon, si bien que des bénéfices ont été déjà engrangés". Ainsi, le coût du kilogramme de coton graine de premier choix (182 F CFA), additionné à la ristourne, va revenir à 200 F CFA pour la campagne 2010-2011.
L'autre partie de la ristourne doit être payée aux producteurs courant 2011, le temps que les sociétés cotonnières fassent le point de leurs bénéfices.
Que restera-t-il de la ristourne quand la Sofitex aura payé le surcoût de 25 F par kilo de coton-graine du fait de la crise ivoirienne qui empêche que le coton soit évacué par le port d’Abidjan ? Sans doute pas grand-chose. Les producteurs seraient bien avisés de tout faire pour que ce « pas grand-chose » ne se transforme pas « en rien du tout ! »
Sources : AFP et Abidjan.net
Koudougou, le 23 janvier 2011,
Maurice Oudet
Président du SEDELAN