abc Burkina n° 128 |
Vos réactions à "Faits saillants" ou la distinction entre "soutien" et "subvention" |
Le dernier abc Burkina n° 127 a suscité quelques réactions. Notamment les deux points suivants.
De fait, ces deux assertions sont contestables. Et surtout, je ne voudrais pas vous faire croire que nous partageons le point de vue de certains partisans du libéralisme intégral sur le plan agricole. Pour nous, partisans de la souveraineté alimentaire, il est clair que nous revendiquons un réel "soutien" de l'agriculture (le droit de protéger son agriculture par des taxes à l'importation). Pour mieux comprendre l'enjeu du débat, je vous propose la lecture de la fiche ci-dessous (qui se trouvait déjà sur notre site). C'est un peu technique, mais très éclairant. Je vous invite aussi à aller lire : Echanges agricoles Nord-Sud et réforme de la PAC et de l'Accord sur l'agriculture : éviter les simplifications trompeuses 04 mars 2003 (document html) (Également de Jacques Berthelot) Série de 10 fiches introductives pour comprendre l'Accord sur l'Agriculture (AsA) de l'OMC. 1. La distinction préliminaire entre soutien et subvention Par Jacques Berthelot (berthelot@ensat.fr,
http://solidarite.asso.fr/actions/Agriculture.htm) Ces dernières années les médias et institutions internationales ont propagé l'idée que les pays de l'OCDE subventionnent leurs agriculteurs à environ 1 milliard de $ par jour (ou quelque 300 milliards de $ par an), et que chaque vache de l'UE est subventionnée à 2,2 € par jour, soit plus que ce qu'ont pour survivre 2,8 milliards d'êtres humains selon la Banque mondiale! Pour démystifier ces chiffres, il est essential de distinguer les concepts de soutien et de subvention, bien que l'OCDE et les autres promoteurs du libre-échange préfèrent cacher cette distinction. Si toute subvention – c'est-à-dire une dépense publique financée par les contribuables – est un soutien, la réciproque n'est pas vraie : soutien est un concept plus large que subvention puisqu'il englobe "les soutiens du prix du marché", principalement par la protection à l'importation qui accroît l'écart entre prix intérieur et prix mondial. Puisque l'OCDE estime que les consommateurs sont en droit de payer leur alimentation au prix mondial et que la protection à l'importation les en empêche, ils souffrent d'un surplus du consommateur négatif, mesuré par l'écart entre prix intérieur et prix mondial, considéré comme une distorsion des échanges et comme un "transfert des consommateurs aux producteurs", assimilé à une subvention des consommateurs aux producteurs. Les deux principaux indicateurs des soutiens agricoles de l'OCDE sont l'EST (estimation du soutien total) et l'ESP (estimation du soutien au producteur) dont les montants moyens annuels de 2001 à 2003 ont été respectivement de 330 milliards de $ et de 243 milliards de $. L'EST est égal à l'ESP plus l'ESSG (estimation du soutien aux services d'intérêt général), qui regroupe les subventions accordées collectivement aux agriculteurs et en nature (enseignement agricole, recherche agricole, vulgarisation, infrastructures, etc.). Puisque le "soutien des prix du marché" (transfert des consommateurs aux producteurs) a représenté 148 milliards de $, soit 45% de l'EST et 61% de l'ESP, la composante subventions effectives est bien inférieure aux chiffres diffusés par les médias: 186 milliards de $ pour l'EST et 94 milliards de $ pour l'ESP. De plus le concept de "soutien des prix du marché" de l'OCDE est totalement biaisé puisqu'il suppose que les agriculteurs vendent aux consommateurs, ce qui concerne désormais moins de 10% de leur production, le reste étant vendu aux industries agroalimentaires qui sont celles qui encaissent le surplus. Effectivement les fortes baisses du prix des céréales et de la viande bovine dans l'UE depuis 1992 n'ont pas été répercutées dans les prix aux consommateurs, comme la Cour des comptes européenne l'a souligné. La soi-disant subvention de 2,2 € par jour à chaque vache laitière de l'UE est une mystification plus énorme encore puisque le soutien des prix du marché représente environ 80% de l'ESP des produits laitiers, la "subvention" réelle étant de 0,44 €, la moitié de cette somme correspondant aux subventions à l'exportation y compris la vente à perte des stocks d'intervention sur le marché mondial. Pour d'autres auteurs ce sont en fait les producteurs de l'UE qui subventionnent les consommateurs puisque le prix du lait serait supérieur si le marché mondial des produits laitiers fonctionnait en libre-échange[1]. (Voir aussi la fiche "Les MGS spécifiques liés à des prix administrés")[1] Maurice Doyon, Nicolas Paillat and Daniel-M. Gouin, Critical Analysis of the Concept of the Producer Subsidy Equivalent in the Dairy Sector (Dairy PSE), GREPA, 13-11-01
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