Koudougou, le pays où coule le lait et le miel

2) Le lait du Boulkiemdé

Cet  abc Burkina fait suite au n° 156 (Le miel du Boulkiemdé), mais aussi au n° 134 :
Les femmes peuls (éleveurs traditionnels) de Koudougou transforment le lait importé venu d'Europe !

En mai (2005), nous écrivions : "Vu l'enthousiasme de ces femmes à l'idée de transformer à nouveau du lait produit localement et l'intérêt des éleveurs à pouvoir commercialiser du lait toute l'année, nous sommes décidés à appuyer cette association de femmes pour qu'elles puissent mettre en place une laiterie sur la ville de Koudougou. Cette laiterie devrait pouvoir commercialiser du lait pasteurisé, du dégué et des yaourts. Nous nous appuierons sur les radios locales pour aider les consommateurs à se détourner du lait importé pour se tourner vers le lait frais et les produits locaux."

Depuis le 20 juillet, nous pouvons dire que la mini-laiterie de Koudougou est née. Elle s'appelle : " Le lait du Boulkiemdé " ou, en fulfuldé, "Kosam wuro men".

Elle transforme chaque jour, en moyenne, 60 à 70 litres de lait par jour. C'est encore modeste. Mais la laiterie doit faire face au produits fabriqués à partir du lait en poudre importé. Les clients sont unanimes à dire que les produits marqués "Lait du Boulkiemdé" sont meilleurs que les produits fabriqués à partir de lait en poudre importé, mais ils ne sont pas tous prêts à payer plus cher. Or, la laiterie paie le lait 250 F CFA dans les villages des éleveurs traditionnels. A cela, il faut ajouter 25 F par litre collecté (par des jeunes qui partent chaque matin en vélo acheté une partie de la traite du matin). Le 1/4 de litre de lait pasteurisé est revendu 100 F aux revendeuses ou au boutiques. Celles-ci le revendent 125 F. Le 1/4 de litre de yaourt ou de dégué est cédée aux vendeuses ou aux boutiques à 125 F pour être revendu à 150 F.

Nous nous sommes rendus compte que la moindre petite boutique de produits alimentaires qui possède un réfrigérateur commercialise des yaourts fabriqués à partir de lait en poudre. Le plus souvent, ces yaourts sont fabriqués par le boutiquier lui-même ou par sa famille. Le yaourt est vendu dans des sacs en plastiques fermés par une simple ficelle, sans étiquettes. Comme le litre de lait reconstitué à partir de lait importé revient à environ 200 F, ces yaourts sont vendus le plus souvent moins chers que les yaourts de la nouvelle laiterie "Le lait du Boulkiemdé".

D'un autre côté, nous profitons du fait que le yaourt est maintenant assez répandu et apprécié dans les villes du Burkina. Le lait pasteurisé est également apprécié, mais sa conservation pose problème. Nous avons dû renoncé à en vendre aux boutiquiers. Leurs frigos sont le plus souvent surchargés de différentes boissons, constamment ouverts... si bien que la température interne avoisine les 25 ° C, bien loin des 4 à 6° recommandés.

Nous avons également entrepris un travail en amont, auprès des éleveurs des villages où le lait est collecté. Il s'agit d'améliorer l'hygiène de la traite, la santé des animaux, et proposer quelques actions pour stocker suffisamment de foin pour nourrir quelques vaches durant la saison sèche. A ce niveau beaucoup reste à faire. Cela demandera un investissement conséquent qui fait encore défaut !

Heureusement nous pensons pouvoir compter sur quelques éleveurs modernes pour avoir suffisamment de lait pour l'année qui vient. Et nous espérons que les prochaines années les éleveurs traditionnels vont augmenter leur production de lait en saison sèche, en même temps que la demande des consommateurs se fera plus forte !

En résumé, la laiterie "Le lait du Boulkiemdé" est encore fragile, mais la détermination des femmes peules est forte. La laiterie (vendeuses et collecteurs de lait compris) donne du travail à 16 personnes (certaines à mi-temps) et quelques ressources supplémentaires à près de 40 femmes dans les villages voisins.

Le lait en poudre en provenance de l'Europe bénéficie de subvention très importante de la part de l'Europe : de l'ordre de 47 %. Il suffirait d'introduire une "Taxe de compensation des subventions à l'exportation" pour que les yaourts de la laiterie de Koudougou soient non seulement les meilleurs du marché (sur Koudougou), mais aussi les moins chers. Et que les femmes peules qui transforment le lait produit localement puissent vivre dignement de leur travail. Actuellement, elles ne gagnent, en moyenne, qu'un euro par jour !

Koudougou, le 22 octobre 2005
Maurice Oudet

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