abc Burkina n° 70 |
Le poids des mots :
Sécurité alimentaire ou souveraineté alimentaire, il est temps de choisir ? |
Ils sont nombreux aujourd'hui ceux qui ne perçoivent pas bien la différence entre "sécurité alimentaire" et "souveraineté alimentaire". Pourtant derrière ces mots se cachent un enjeu considérable. Opter pour la seule sécurité alimentaire (donc sans souveraineté alimentaire), c'est condamner à la misère un milliard de petits paysans à travers le monde. Expliquons-nous ? Deux questions ? Aujourd'hui, il ne manque pas de nourriture sur notre planète. Et les paysans sont capables de produire beaucoup plus si on leur offre un prix rémunérateur pour leur production agricole. Les questions qui se posent actuellement sont celles-ci :
La réponse des Etats-Unis et de l'Europe à ces questions :
L'alternative paysanne : la souveraineté alimentaire Le concept de souveraineté alimentaire a été développé par Via Campesina et porté au débat public à l’occasion du Sommet Mondial de l’Alimentation en 1996 et présente une alternative aux politiques néo-libérales. Il dépasse la seule sécurité alimentaire. Il répond aussi à la question : qui va produire la nourriture dont la population mondiale a besoin ? La souveraineté alimentaire désigne le DROIT des populations, de leurs Etats ou Unions à définir leur politique agricole et alimentaire, sans dumping vis à vis des pays tiers. La souveraineté alimentaire inclut : La priorité donnée à la production agricole locale pour nourrir la population, l’accès des paysan(ne)s et des sans-terre à la terre, à l’eau, aux semences, au crédit. D’où la nécessité de réformes agraires, de la lutte contre les OGM (organismes génétiquement modifiés) pour le libre accès aux semences, et de garder l’eau comme un bien public à répartir durablement. Le droit des Etats à se protéger des importations agricoles et alimentaires à trop bas prix. Des prix agricoles liés aux coûts de production : c’est possible à condition que les Etats ou Unions aient le droit de taxer les importations à trop bas prix, s’engagent pour une production paysanne durable et maîtrisent la production sur le marché intérieur pour éviter des excédents structurels. La participation des populations aux choix de politique agricole. La reconnaissance des droits des paysannes, qui jouent un rôle majeur dans la production agricole et l’alimentation. Un exemple pour conclure : Le jour où la souveraineté alimentaire sera appliquée au Burkina Faso, les importations de riz seront contrôlées par des taxes à l'importation ou par des quotas. Un prix plancher sera assuré pour le riz paddy, correspondant aux coûts de production. Il sera donc de l'ordre de 120 à 140 F le kilo. Les producteurs de riz du Sourou retrouveront l'espoir. En un ou deux ans, ils doubleront leur production. Ils soigneront leurs rizières ; ils feront du compost pour entretenir la fertilité de leurs parcelles…Ils pourront se soigner convenablement, et mettre leurs enfants à l'école. Les Ouagalais oublieront les brisures de riz venant d'Asie et apprécieront à nouveau le bon goût du riz burkinabè. Le pays tout entier économisera des devises, car bientôt la production locale suffira à la consommation. P-S : Le sommet du CILSS (Comité permanent Inter Etats de Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel) à Nouakchott s'est terminé le 26 janvier. Les 9 pays membres du CILSS sont : le Burkina Faso, le Cap Vert, la Guinée Bissau, la Gambie, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, et le Tchad. 7 chefs d'Etat étaient présent. On y a beaucoup parlé de sécurité alimentaire, mais pas encore de souveraineté alimentaire. C'est dire qu'il reste du chemin à parcourir. Maurice Oudet |
Retour au dossier Vu au Sud - Vu du Sud |
Accueil - Politiques agricoles et Pays du Sud - Actualités - Actualités du coton Auteur |