A Cancún, en
s'attaquant aux subventions agricoles, les
Pays en développements (PEV) et les Pays les moins avancés (PMA) ont pu
donner l'impression qu'ils étaient contre tout soutien à l'agriculture.
Ils ont semblé se rapprocher du groupe de Cairns. Pourtant, les
intérêts des PMA n'ont rien avoir avec ceux du groupe de Cairns. Mais
que pouvons nous retenir de Cancún :
A Cancún
, les pays riches ( notamment les Etats-Unis, l'Union Européenne et le
Japon)ont montré clairement qu'ils n'envisageaient pas de supprimer leur
soutien à leurs agricultures. En même temps il est apparu que les
subventions agricoles de ces pays à leurs producteurs nuisaient gravement
aux agricultures du Sud. Il est donc urgent de trouver une alternative aux
subventions agricoles. Même en Europe, il y a de plus en plus de paysans
qui pensent ainsi. Or depuis quelques années, une idée fait son chemin.
Je veux parler de la protection à l'importation. Aussi, j'ai pensé
intéressant de vous communiquer ce texte de Jacques Berthelot (auteur de
"L'agriculture, talon d'Achille de la mondialisation.")
Voici les 8 raisons données par Jacques Berthelot pour
justifier que la protection à l'importation est la forme de soutien des
agricultures la moins protectionniste :
- 1) D'abord pour les économistes, toute mesure
qui accroît la compétitivité des produits nationaux par rapport aux
produits étrangers est une forme de protection. C'est pourquoi on
doit bannir l'utilisation du terme protection sans ajouter "à
l'importation" quand c'est de cela dont on veut parler. En effet,
dans le domaine des échanges internationaux, le terme protection (et
encore plus protectionnisme) est connoté très négativement, en lui
accolant des qualitatifs tels que replis frileux sur soi, spectre,
vieux démon, tentation, hydre, piège, etc.
- 2) Comme le dit Vandana Shiva, "Le
libre-échange n'est pas l'anti-protectionnisme. C'est le
protectionnisme des puissants".
- 3) La protection à l'importation est le seul
soutien accessible aux pays pauvres, qui n’ont pas les moyens
budgétaires de subventionner significativement leurs agriculteurs, d’autant
qu’ils représentent la majorité des actifs.
- 4) Tous les types de subventions, même de
type environnemental, réduisent les coûts de production et ont donc
un effet de dumping lorsque les produits bénéficiaires sont
exportés.
- 5) Seuls les pays riches peuvent se protéger des
importations sans avoir besoin de se protéger à
l’importation : en subventionnant l’abaissement des prix
intérieurs jusqu’au niveau des prix mondiaux de telle sorte qu’il
n’y a plus d’incitation à importer.
- 6) Il est socialement régressif que les
citoyens les plus pauvres financent (à travers la TVA) l'alimentation
des plus riches.
- 7) La protection à l’importation est le
seul moyen de rebâtir une PAC orientée par le marché, où l’essentiel
du revenu soit basée sur les prix, mais sur les prix agricoles intérieurs,
pas sur des prix mondiaux très volatils, de dumping et sans
aucun sens économique.
- 8) La protection à l'importation
simplifierait aussi énormément l'AsA : dès lors que le nouvel AsA
posera comme principe de base que tout pays est libre de déterminer
le niveau et les types de protection à l'importation des produits
agroalimentaires jugées appropriées, il est inutile de fixer des
règles sur les soutiens internes. A la limite, même les restitutions
à l'exportation ne seraient pas graves puisque chaque pays pourrait
s'en protéger à l'importation. Cependant, compte tenu de
l'incapacité politique de très nombreux pays du Sud à accroître
cette protection par suite des pressions du FMI et de la Banque
mondiale, l'élimination des subventions explicites et implicites à
l'exportation reste prioritaire. (par Jacques Berthelot, le 18 juillet
2003)
Texte présenté par Maurice Oudet
Koudougou le 11 octobre 2003
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